Effectuer une recherche

Ordonnance n° 45-1554 du 16 juillet 1945 relative au dépôt des devises étrangères et des valeurs mobilières étrangères conservées sur les territoires relevant du ministre des colonies.

LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE, CHEF DU GOUVERNEMENT

L’ordonnance du 7 octobre 1944 a prescrit le dépôt en banque de devises étrangères et des valeurs mobilières étrangères-conservées sur le territoire de la France métropolitaine.

Des mesures prises dans les territoires relevant du Ministre des Colonies avaient déjà prescrit la déclaration et le blocage des avoirs de l’espèce conservés sur ces territoires. Une unification de la réglementation en la matière paraît à l’heure actuelle nécessaire.

L’ordonnance proposée au Gouvernement prescrit, en conséquence, le dépôt des devises étrangères et des valeurs mobilières étran gères conservées dans les colonies ; d’autre part, elle lève les mesures de blocage dont les valeurs mobilières étrangères sont actuel lement frappées.

Le Gouvernement provisoire de la République française,

Sur le rapport du Ministre des Colonies et du Ministre des Finances,

Vu l’ordonnance du 3 juin 1943 portant institution du Comité français de la Libération nationale, ensemble les ordonnances des 3 juin et 4 septembre 1944;

Vu l’ordonnance du 5 octobre 1943 rela tive à la déclaration et au blocage des avoirs en or et des avoirs à l’étranger ou en devises étrangères ;

Vu le décret du 9 septembre 1939 prohibant ou réglementant en temps de guerre l’exportation des capitaux, les operations de chan ges et le ommerce de l’or et les textes sub séquents qui l’ont complété ou modifié ;

Vu le décret du 9 septembre 1939 portant application aux colonies et territoires afri cains sous mandat français du décret du 9 septembre 1939 susvisé :

Vu l’ordonnance du 2 février 1944 trans formant la caisse centrale de la France libre en caisse centrale de la France d’outre-mer:

Le Comité juridique entendu.

 

ORDONNE

TITRE Ier

Dispositions relatives aux devises étrangères

Article 1er. — Les personnes physiques ou morales qui possèdent ou détiennent sur les territoires relevant du Ministre des Colonies des billets de banques étrangers, des chèques, lettres de crédittraites. effets de commerce et tous autres titres de créance à vue ou à court terme, libellés en monnaie étrangère, sont tenues de les déposer chez un intermé diaire agréé pour les opérations de change.

Art. 2. — L’exécution du dépôt prévue par l’article 1er ne dispense pas le propriétaire des devises étrangères ainsi déposées de l’obligation de cession desdites devises aux offices coloniaux des changes dans tous les cas où cette cession est prescrite par le décret du 9 septembre 1939.

Article 3. — Les personnes physiques qui résident habituellement à l’étranger sont autorisées à conserver par devers elles pen dant la durée de leur séjour sur les territoires relevant du Ministre des Colonies, les billets de banque étrangers qu elles ont regulièrement importés pour faire face à leurs dépenses d’entretien pendant ledit séjour et dont elles ne désirent pas effectuer le dépôt dans les conditions prévues par l’article 1er, étant entendu que ces billets ne peuvent être que cédés aux offices coloniaux des changes ou réexportés.

TITRE II

Dispositions relatives aux valeurs mobilières étrangères

Art. 4. — Les personnes physiques ou mo rales qui possèdent ou détiennent sur les territoires relevant du Ministre des Colonies des valeurs mobilières étrangères sont tenues de les déposer auprès d’une banque habilitée à cet effet par le chef du territoire.

Art. 5. — Les valeurs mobilières étrangères déposées en application de l’article 4 de la présente ordonnance peuvent être négociées dans les conditions prévues par la réglementation des changes, nonobstant les disposi tions des articles 5 et 6 de l’ordonnance du 5 octobre 1943 relative à la déclaration et au blocage des avoirs en or et des avoirs à l’étranger ou en devises étrangères et sous réserve que l’acquéreur les laisse en dépôt chez un des intermédiaires de son choix visés par ledit article 4.

TITRE III

Dispositions communes

Art. 6. — L’obligation édictée par les arti cles 1 er et 4 s’applique : 

1 Aux personnes physiques quelle que soit leur nationalité ou leur résidence :

2 Aux personnes morales françaises ou étrangères pour leurs établissements tant sur les territoires français qu’à l’étranger.

Art. 7. Le dépôt prévu par les articles 1er et 4 doit avoir lieu :

1” Dans un délai de deux mois, à compter de la date de la mise en vigueur de la pré sente ordonnance, en ce qui concerne les devises étrangères et les valeurs mobilières étrangères qui sont conservées à cette date sur les territoires relevant du Ministre des Colonies ;

2 Dans un delai de quinze jours à comp ter de leur importation sur un territoire relevant du Ministre des Colonies, en ce qui concerne les devises étrangères et les valeurs mobilières étrangères qui sont importées pos térieurement à ladite date. Toutefois, les offices coloniaux des changes peuvent accorder des délais supplémentaires aux personnes qui, par suite d’un cas de force majeure, sont dans l’impossibilité de procéder au dépôt prescrit dans les délais prévus ci-dessus et qui peuvent fournir auxdits offices toutes justifications utiles à cet égard.

Art. 8. — Toute personne physique ou mo rale qui détient, à un titre quelconque, sur les territoires relevant du Ministre des Colo nies. des devises étrangères ou des valeurs mobilières étrangères appartenant à un tiers:

1° Ne peut remettre ces avoirs à leur pro priétaire que lorsque celui-ci est lui-même un des intermédiaires prévus respectivement par les articles 1 er et 4 ;

2° Doit effectuer, pour le compte de ce dernier, le dépôt prévu par lesdits articles, dans les délais fixés par l’article 7 à moins qu’elle ne soit elle-même un des intermé diaires prévus respectivement par les articles 1er et 4.

Art. 9. — Des dérogations à l’obligation de dépôt prévue par les articles 1er et 4, peuvent être accordées par le Ministre des Colonies et le Ministre des Finances ou par la Caisse centrale de la France d’outre-mer pour certaines catégories de devises étran gères ou de valeurs mobilières étrangères.

Les offices coloniaux — des changes peuvent également accorder des dérogations dans les cas particuliers où une telle mesure parait justifiée.

Art. 10. — Est interdite, à compter de l’expiration des délais fixés par l’article 7. la détention sur les territoires relevant du Ministre des Colonies, par toute personne autre que les intermédiaires visés respectivement par les articles 1 er et 4, des devises étrangères et des valeurs -mobilières étran gères, sauf dérogation accordée dans les con ditions prévues par l’article 9 et sous réserve des dispositions de l’article 3.

Art. 11. — Les infractions aux dispositions de la présente ordonnance ainsi que les arrêtés ou instructions du Ministre des Colonies et du Ministre des Finances, et des instructions de la Caisse centrale de la France d’outre-mer pris pour son application, sont constatées, poursuivies et réprimées dans les conditions fixées par le décret du 9 septembre 1939 prohibant ou réglementant en temps de guerre l’exportation des capitaux, les opérations de change et le commerce de l’or.

Art. 12. — La présente ordonnance sera publiée au Journal Officiel de la République Française et exécutée comme loi. 

 

Ch DE GAULLE.

Par le Gouvernement provisoire de la République française :

Le Ministre des Finances.

R PLEVEN

Le Ministre des Colonies.

P. GIACOBBI.