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Loi n° 52/AN/94/3e L portant création d’une Cour d’Appel et d’un Tribunal de Première Instance.

L'ASSEMBLÉE NATIONALE A ADOPTÉ
LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE PROMULGUE
LA LOI DONT LA TENEUR SUIT :

L’Assemblée nationale a adopté ;

 

Le président de la République promulgue la loi dont la teneur suit :

 

Vu la Constitution du 15 septembre 1992 ;

 

Vu le décret n°93‑010/PRE du 4 février 1993 remaniant le gouvernement djiboutien et fixant ses attributions ;

 

Article premier ‑ Il est créé une Cour d’Appel et un Tribunal de Première instance en remplacement de la Cour judiciaire.

 

Sauf exception prévue par la loi, la Cour  d’appel  et le Tribunal de première instance connaissent de toutes les affaires civiles, commerciales, pénales et sociales.

 

Art. 2. ‑ Le ressort de la Cour d’Appel s’étend à l’ensemble du territoire national. Provisoirement le ressort du Tribunal de Première Instance est celui de la Cour d’Appel.

 

Le siège de chacune de ces juridictions est fixé à Djibouti.

 

Art. 3. ‑ Sauf disposition procédurale contraire, les audiences sont publiques, à moins que cette publicité ne soit dangereuse pour l’ordre ou pour les mœurs ; auquel cas la juridiction saisie le déclare par arrêt ou jugement préalable.

 

Dans tous les cas, les arrêts et jugements sont prononcés publiquement.

 

Art. 4. ‑ Tant en matière civile que répressive, nul ne peut être jugé sans être mis en mesure de présenter ses moyens de défense.

 

Les avocats ont libre accès devant toutes les juridictions.

 

Seules les juridictions instituées par la loi peuvent prononcer des condamnations.

 

Art. 5. – Les arrêts et jugements doivent être motivés à peine de nullité.

 

Art. 6 – La justice est rendue au nom du peuple djiboutien.

 

Les décisions sont revêtues de la formule exécutoire dans les conditions prévues à l’article 41.

 

TITRE I

 

Organisation et fonctionnement des juridictions

 

CHAPITRE I

 

La Cour d’Appel

 

Art. 7. ‑ La Cour d’Appel comprend :

 

‑ une chambre civile et commerciale,

 

‑ une chambre correctionnelle et de simple police,

 

‑ une chambre d’accusation,

 

– une chambre sociale.

 

Art. 8. ‑ La Cour d’Appel se compose d’un premier président et de conseillers.

 

Les conseillers à la Cour d’Appel sont affectés aux différentes chambres par ordonnance du premier président de la Cour.

 

Celui‑ci préside les audiences solennelles, les assemblées générales et les audiences de la chambres civile ;  il préside aussi toute autre chambre quand il le juge utile.

 

En cas de besoin, le premier président peut faire appel à des juges de première Instance n’ayant pas connu de l’affaire soumise à la Cour.

 

Art. 9. ‑ La Cour d’Appel connaît des appels des décisions rendues en premier ressort par le Tribunal de Première Instance.

 

Art. 10. ‑ Les arrêts des chambres de la Cour d’Appel sont rendus par trois magistrats.

 

Art. 11. – Le ministère public est représenté devant la Cour d’Appel par un procureur général de la République assisté de substituts généraux.

 

Les fonctions du procureur général sont celles définies par la loi.

 

Art. 12.‑ Sous l’autorité et le contrôle du premier président de la Cour d’Appel et du procureur général, le greffier en chef assure le fonctionnement du greffe de la cour.

 

CHAPITRE II

 

La Cour criminelle

 

Art. 13. ‑La Cour criminelle est une juridiction non permanente appelée à juger les crimes dont elle est saisie conformément aux dispositions  légales relatives à la procédure pénale.

 

Art. 14. ‑ La Cour criminelle est composée comme suit :

 

– le président de la Cour d’Appel ou un conseiller, président,

 

– deux conseillers à la Cour d’Appel,

 

– quatre jurés.

 

Les membres de la Cour sont désignés par ordonnance du premier président de la Cour d’Appel.

.

A défaut de conseillers en nombre suffisant, le président de la Cour d’Appel peut désigner un ou deux juges du Tribunal de Première instance pour compléter la Cour criminelle.

 

Lorsque les débats sont susceptibles de longs développements, un magistrat supplémentaire peut être désigné pour les suivre et siéger en cas de défaillance d’un des magistrats composant la Cour.

 

Art. 15. ‑ Les jurés sont tirés au sort sur une liste de vingt‑cinq noms comprenant des citoyens âgés de trente ans au moins, sachant lire et écrire, jouissant de leurs droits civiques et politiques et honorablement connus.

La liste est arrêtée annuellement sur proposition du commissaire de la République, chef du district de Djibouti, transmis au ministre de la Justice.

 

Les fonctions de juré sont incompatible avec l’exercice d’une fonction gouvernementale ou d’un mandat parlementaire, ainsi qu’avec la qualité de fonctionnaire de la police, de militaire, des secrétaires généraux, des directeurs, des ministères, des chefs des districts et les magistrats d’ordre judiciaire.

 

Nul ne peut être juré dans une affaire où, il est dénonciateur plaignent ou partie civile, témoin, expert, Interprète ou parent.

 

Art. 16. ‑ Les jurés ont voix délibérative sur les questions de culpabilité et sur l’application de la peine.

 

Les juges statuent seuls sur les questions de compétence, sur les incidents de droit ou de procédure et sur les intérêts civils.

 

Art. 17. ‑ Le procureur général siège au ministère public ou délègue un substitut général. A défaut, il peut déléguer le procureur de la République ou un substitut.

 

Art. 18. ‑ Le Greffier en chef de la Cour d’Appel assiste aux audiences de la Cour criminelle ; le cas échéant, il est remplacé par un greffier de la Cour d’Appel ou du Tribunal.

 

CHAPITRE III

Le Tribunal de Première instance

 

Art. 19. ‑ Le Tribunal de Première instance comprend :

 

– une chambre civile et commerciale,

 

– une chambre correctionnelle et de simple police,

 

– une chambre sociale,

 

– une juridiction d’instruction.

 

Art. 20. ‑ Le Tribunal de première instance se compose d’un président, de juges et de juge d’instruction.

 

Art. 21. ‑ Le ministère public est représenté devant le Tribunal de Première Instance par un procureur de la République assisté de substituts.

 

Le procureur de la République est placé sous l’autorité du procureur général de la République.

 

Outre les attributions qui lui sont conférées par la loi, le procureur de la République jouit, devant le Tribunal de Première Instance, des mêmes droits que les parties aux procès, il peut déposer des conclusions, prendre la parole et exercer les voies de recours.

 

Art. 22. ‑ Le Tribunal de Première Instance statue à juge unique. Les audiences sont tenues par le président du tribunal ou à défaut, par un juge délégué par lui, assisté d’un greffier, et en présence du procureur de la République ou de son substitut.

 

La présence du Ministère public est facultative dans les affaires civiles, commerciales et sociales.

 

Art. 23. ‑ Lorsque la nature de l’affaire le requiert, le président du tribunal peut, en toutes matières, après avis ou sur réquisitions du procureur de la République, décider que le tribunal statuera en formation collégiale à trois magistrats.

 

Cette décision est une mesure administrative non susceptible de recours.

 

Art. 24. ‑ Sauf exception prévue par la loi, le Tribunal de Première instance est juge de droit commun en toutes matières.

 

Art. 25. ‑ Le Tribunal de Première instance peut tenir des audiences foraines dans tout son ressort.

 

Art. 26. ‑ Le Tribunal de Première Instance connaît, en premier et dernier ressort des actions civiles, et commerciales jusqu’à la valeur de 200.000 FD en principal et de 50.000 francs de revenus mensuels.

 

Art. 27. ‑ Le Tribunal correctionnel est compétent, en matière répressive, pour statuer sur les demandes tendant à rendre l’État ou une autre collectivité publique responsable du fait de ses agents ou préposés.

 

La responsabilité de la personne morale de droit public est, à l’égard des victimes, substituée à celle de son agent ou préposé, auteur des dommages causés dans l’exercice de ses fonctions.

 

Art. 28. ‑ Lorsque la solution d’un procès pénal dépend d’interprétation d’un acte administratif, les juridictions pénales de jugement sont compétentes pour se livrer à cet examen.

 

Si devant le Tribunal de Première instance est soulevée l’illégalité d’un acte administratif de quelque nature qu’il soit, et si du règlement de cet incident dépend la solution du procès-pénal, la Cour d’Appel a seule compétence pour statuer.

 

La même compétence appartient à chacune de ses chambres pénales lors d’une Instance d’appel, ainsi qu’à la Cour criminelle.

 

Le Tribunal de Première instance saisi par voie d’incident, surseoit à la décision sur l’action publique jusqu’à l’arrêt définitif de la Cour, lequel est rendu selon une procédure et des délais fixés par décret. Toutefois, lorsqu’un traité ou une convention diplomatique soulève une question de droit public international, les juridictions doivent se conformer à l’interprétation officielle donnée par le Ministère des Affaires étrangères.

 

Art. 29. ‑ La Chambre sociale connaît des différends individuels entre les travailleurs et leurs employeurs à l’occasion du contrat de travail, du contrat d’apprentissage, des conventions collectives, des conditions de travail, d’hygiène et de sécurité, des contestations en matière d’élection des délégués du personnel et du régime de protection sociale.

 

La Chambre sociale comprend, outre le juge président, un assesseur employeur et un assesseur travailleur.

 

Art. 30. ‑ Sous l’autorité des chefs de la juridiction, le greffier en chef assure le fonctionnement du greffe du Tribunal de Première instance. Il est assisté d’un greffier en chef adjoint qui assure le fonctionnement du secrétariat du parquet.

 

CHAPITRE IV

Le remplacement des magistrats

et l’intérim des fonctions judiciaires

 

Art. 31. ‑ Les magistrats momentanément empêchés sont supplées :

‑ 1e premier président de la Cour d’Appel par le conseiller le plus ancien,

‑ le procureur général par le substitut général le plus ancien, à défaut par le procureur de la République,

‑ le procureur de la République par le substitut le plus ancien,

‑ les juges d’instruction se suppléant entre eux. A défaut, le président du tribunal assume les fonctions de l’instruction ou y délègue un juge du siège.

 

Art. 32. ‑ Il est pourvu à l’intérim du premier président de la Cour d’Appel et du procureur général, ainsi que du président du Tribunal de Première Instance et du procureur de la République par décret du président de la République sur proposition du ministre de la Justice après avis du Conseil supérieur de la Magistrature. Cependant, lorsque l’intérim de ces fonctions est inférieur à un mois, il y est pourvu par décision du ministre de la Justice sur proposition du chef de la juridiction concernée.

 

 

CHAPITRE V

Les audiences

 

Art. 33. ‑ La Cour d’Appel et le Tribunal Première instance se réunissent :

‑ en audience solennelle

‑ en assemblée générale

‑ en audience ordinaire

‑ en audience foraine.

 

Art. 34. ‑ La Cour d’Appel et le Tribunal de première instance peuvent se réunir en audience solennelle, ensemble pour la cérémonie annuelle de rentrée, et séparément pour l’installation de leurs membres et dans les cas prévus par la loi. Tous les membres de la juridiction siègent à l’audience solennelle.

 

Art. 35. ‑ L’assemblée générale donne son avis sur :

– le règlement du service intérieur et sa modification, 

– 1e nombre, les jours et les heures des audiences ordinaires et leur affectation aux différentes catégories d’affaires ;

– Les audiences de vacation et les audiences spéciales.

Elle délibère et statue si il y a lieu sur toutes les questions dont la connaissance lui est attribuée par une disposition de la loi.

Elle délibère de toutes questions touchant à l’administration et aux intérêts de la juridiction.

 

Art 36. ‑ L’audience ordinaire est la formation juridictionnelle normale.

En cas de nécessité, les avocats peuvent être appelés à compléter la Cour d’Appel. Le président fait appel à l’un des avocats présents à l’audience. Cet avocat ne peut, sauf cas d’indisponibilité absolue, refuser la mission temporaire qui lui est ainsi confiée.

 

Art. 37. ‑ La durée des vacances judiciaires est de deux mois.

 

Art. 38. ‑ Les audiences de vacation sont des audiences ordinaires tenues pendant les vacances, au moins tous les quinze jours pour l’expédition des affaires urgentes.

Le calendrier des audiences de vacations est affiché à la porte des prétoires et rendu public par la voie du Journal officiel ou par tout moyen approprié.

 

Art. 39. ‑ La Cour d’Appel et le Tribunal de Première instance peuvent tenir des audiences en dehors de leur siège.

Les sièges d’audiences foraines et le calendrier de celles-ci sont arrêtées pour l’année judiciaire par délibération des juridictions.

En outre, des audiences foraines extraordinaires peuvent être tenues en cas de nécessité.

 

Art. 40. ‑ Le Tribunal de Première instance peut se saisir d’office en agence foraine des délits et contraventions qui lui sont dénoncés. Les parties peuvent comparaître spontanément ou sur simple avertissement. Les témoins sont convoqués sans forme de procédure même verbalement.

 

TITRE II

Dispositions diverses, transitoires

et d’application

 

CHAPITRE I

Dispositions diverses

 

SECTION I

L’intitulé des jugements et arrêts ;

la formule exécutoire

 

Art. 41. ‑ Les expéditions des jugements, arrêts , mandats de justice, ainsi que les copies exécutoires et expéditions des contrats et de tous les actes susceptibles d’exécution forcée, seront intitulée ainsi qu’il suit :

« République de Djibouti

Au nom du peuple djiboutien»

 

et terminés par la formule suivante :

«En conséquence, la République de Djibouti mande et ordonne à tous huissiers de justice sur ce requis, de mettre ledit jugement (ou arrêt, etc) à exécution, au procureur général et au procureur de la République d’y tenir la main, à tous commandants et officiers de la force publique de prêter main-forte lorsqu’ils en seront légalement requis.

En foi de quoi le présent jugement (ou arrêt, etc) a été signé par…».

 

SECTION II

Les incompatibilités

 

Art. 42. ‑ Les conjoints, les parents et alliés jusqu’au degré d’oncle ou de neveu ne peuvent siéger dans la même affaire, soit comme juges, soit comme membre du ministère public, ni les uns connaître en cause d’appel les affaires jugées par les autres en première instance.

 

Art. 43. ‑ Tout magistrat dont un parent ou allié jusqu’au degré d’oncle ou de neveu est l’avocat d’une partie en cause ne peut, à peine de nullité de l’arrêt ou du jugement, être appelé à composer la cour ou le tribunal.

 

SECTION III

Le contrôle

 

Art. 44. ‑ Sous réserve du respect du principe de l’indépendance des magistrats du siège, le ministre de la Justice exerce son contrôle sur l’activité des juridictions et le fonctionnement des services judiciaires par l’organe des services permanent de l’administration centrale du ministère.

 

Art. 45. ‑ Le ministre de la Justice délègue quand il le juge utile, un ou plusieurs magistrat pour des missions d’inspection ou d’enquête sur des faits déterminés. Ces magistrats sont désignés sur proposition des chefs de la Cour d’Appel.

 

Art. 46. ‑ le président de la Cour d’Appel et le procureur général procèdent

à l’inspection périodique des juridictions. Ils s’assurent, chacun en ce qui le concerne, de la bonne administration de la justice et de l’expédition normale des affaires. Ils adressent au ministre, chaque année, avant le 31 janvier, un rapport sur le fonctionnement de la justice au cours de l’année judiciaire écoulée, au vu, notamment, des rapports qui leur sont faits par les chefs de la juridiction de première instance.

La forme de ces rapports et celle des documents statistiques à produire est déterminée par circulaire du ministre.

 

CHAPITRE II

Application de la présente loi

 

Art. 47. ‑ Les dispositions de la présente loi entreront en vigueur dès sa promulgation. Un décret pris en Conseil des Ministres, sur proposition du ministre de la Justice déterminera les conditions d’applications de la présente loi.

 

Art. 48. ‑ Sont abrogés les textes antérieurs dont les dispositions sont incompatibles avec celles de la présents loi et en particulier :

‑ l’ordonnance n° 78‑085 du 16 novembre 1978 portant réorganisation temporaire de la magistrature du siège ainsi que l’ordonnance n° 79‑110 du 15 novembre 1979 la prorogeant,

‑ l’article 19 de la loi n° 100 du 3 juillet 1984 portant définition des attributions du procureur général et du ministère public,

‑ la loi n° 121 du 11 octobre 1984 portant réforme de la composition de la chambre des appels correctionnels de la Cour judiciaire,

‑ les dispositions du Code du Travail relatives à l’institution du tribunal du Travail.

 

Art. 49. ‑ La présente loi sera publiée selon la procédure d’urgence au Journal officiel de la République de Djibouti.

 

par le président de la République

HASSAN GOULED APTIDON.